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Gigny

 

Edifice
Eglise Saint-Taurin, ancienne abbatiale Saint-Pierre
Situation
Centre village, 39320 (Jura)
Parties Romanes
Nef, bas-côtés, transept, clocher et chœur
Décoration Arcatures du clocher, modillons, chapiteaux du portail sud, culots sculptés
Datation
Première moitié du 11e siècle (façade, bas-côtés, croisée et chœur) et milieu du 12e siècle (nef et clocher)

 

 

Introduction - Historique - Description - Visite

 

Introduction

L’église abbatiale de Gigny est un site important pour l’histoire clunisienne et pour l’art roman du Jura. L’abbaye bénédictine fut fondée vers 890 et son abbé Bernon partira en 910 pour fonder la grande abbaye de Cluny. Une grande abbatiale, sans doute inspirée par Cluny II, fut construite à Gigny dans la première moitié du 11e siècle. Malgré plusieurs remaniements on rencontre encore aujourd’hui une bonne partie de l’abbatiale du 11e siècle dans l’église actuelle : la nef de six travées, les bas-côtés voûtés d’arêtes, la croisée du transept sous coupole et le chœur voûté en berceau avec ses doubles arcades sur piliers octogonaux. Le plan original du chevet à doubles bas-côtés et trois absides, retrouvé par les fouilles, montrait des liens étroits avec Cluny, comme l’existence probable d’une avant-nef. Le clocher octogonal aux arcatures aveugles, le petit portail sud aux chapiteaux et corbeaux, ainsi que les parties hautes de la nef aux culots et modillons sculptés de têtes sont des additions du 12e siècle. Les transformations tardives comprennent l'abside au chevet plat du 13e siècle, la destruction des croisillons, l'ajout de chapelles latérales gothiques, le portail occidental du 15e siècle, la réfection les piliers de la nef, le revoûtement de la nef au 17e siècle, ainsi que la reconstruction de la tour du clocher au 17e siècle. Il ne reste pratiquement rien des bâtiments claustraux du prieuré, mais la place devant l’église regroupe encore des maisons anciennes du chapitre.

 

Ensemble extérieur

 

Historique

La fondation de l’abbaye bénédictine par Bernon, dans un site isolé de la vallée du Suran, se situe vers 893. Elle est placée sous la protection directe du siège romain en 895 par une bulle du pape Formose. Le monastère et une première église dédiée à St-Pierre sont construit à partir de 898. Gigny reçoit la cella de Baume en 890 par Louis, Roi de Provence, confirmée en 903 par Rodolphe Ier. Bernon part en 909, avec des moines de Gigny et de Baume, pour fonder la fameuse abbaye de Cluny. Gigny reçoit les reliques de Saint Taurin d'Evreux vers 913. Une grande abbatiale fut construite dans la première moitié du 11e siècle, vraisemblablement inspirée par Cluny II. L’abbaye de Gigny fut donnée à Cluny en 1076 par le pape Grégoire VII pour restaurer la discipline, puis réduite au rang de prieuré en 1095. Un incendie en 1157 détruit le monastère et le village, mais l’église échappe à la destruction, à l’exception de sa charpente. Les bâtiments du prieuré sont reconstruits en 1333. Le prieuré passe en commende 1442. Le prieur illustre Julien Della Rovere, le futur pape Jules II, fait restaurer l’église et sa façade en 1495. Le prieuré est en mauvais état à la fin du 16e siècle. L’église et la maison du prieur sont restaurés en 1643. Le prieuré fut sécularisé en 1760, l’église devint alors collégiale Saint-Pierre-Saint-Louis dotée d’un collège de chanoines. La communauté fut définitivement supprimée à la Révolution et l’église devint paroissiale Saint-Taurin en 1789. Le cloître fut détruit et les maisons des chanoines sont vendues. Le croisillon nord et une chapelle contiguë ont été détruits vers 1810. L’église, classée monument historique en 1913, a été restaurée en 1953. Plusieurs fouilles et prospections archéologiques (1992, 2003, 2010 et 2018) ont augmenté les connaissances sur les états successifs de l’abbatiale et ses parties disparues.

 

Intérieur depuis le chœur vers la nef

 

Description

L’église se présente comme un long vaisseau rectangulaire dépourvu de transept. Le gros-œuvre de l’édifice remonte à la première moitié du 11e siècle, mais on peut identifier une seconde campagne romane pour ses parties hautes vers le milieu du 12e siècle, ainsi que plusieurs remaniements tardifs. Son plan comprend une nef de six travées, une croisée sous clocher, et un chœur profond de trois travées, le tout flanqué de bas-côtés continues. Des chapelles latérales flanquent le chœur au nord et au sud, à l’emplacement des parties extérieures du chœur primitif, qui se composait de doubles bas-côtés et de trois absides, sur le modèle de Cluny II. L’abside centrale a été remplacée au 13e siècle par une abside rectangulaire en style gothique et les absidioles ont disparues. Les bras du transept, voûtés en berceau, ont été détruits. Les recherches ont montré l’existence d’une avant-nef devant la façade ouest, probablement avec trois travées voûtées et deux tours, également de facture clunisienne. Le cloître et ses bâtiments adjacents ont été détruits mais quelques constructions plus tardives du prieuré subsistent encore autour de l’église.

 

Plan de l'église

 

L’extérieur de l’église est d’aspect sobre et solide. Les remaniements n’y laissent guère deviner l’église du 11e siècle. Les murs de la façade remontent en partie à cette époque, mais le grand portail flamboyant avec les armes de Julien Della Rovere remonte à 1495. La grande nef à deux niveaux présente des arcs-boutants du 17e siècle. Les baies des bas-côtés ont été agrandies au 18e siècle et le portail muré au sud remonte à la même époque. Dans la partie haute, les murs ont été rehaussés, et dans les deux dernières travées du coté sud, on trouve des arcades aveugles entourant les fenêtres hautes. La croisée est dominé par un clocher octogonal dont les étages supérieurs sont du 18e siècle. La base du clocher du milieu du 12e siècle est décorée sur le flanc nord de doubles baies aveugles sous petites arcatures. Le chevet plat est gothique avec un triplet de hautes baies sous un oculus avec personnages sculptés et une tourelle latérale.

 

Extérieur de l'église :
Façade
Net et chœur
Chevet plat
Abside
Murs de la nef
Arcades hautes
Clocher
Arcatures
'

 

Dans les parties hautes de la nef, comme pour le clocher, on devine encore un décor roman soigné du 12e siècle. En haut de la façade, au-dessus de la rose, on aperçoit l’archivolte billetée d’une ancienne baie romane. Sous la corniche de la nef, on aperçoit des modillons, sculptés de têtes et d’animaux. Un petit portail au sud, qui faisait communiquer le croisillon avec le cloître, présente un joli décor roman de voussures, colonnettes, chapiteaux feuillagés et corbeaux sculptés de têtes.

 

Décor roman de l'extérieur :
Archivolte de la façade
Portail sud
Chapiteaux
Chapiteaux
Modillons
Modillons
Modillons
Modillons

 

La grande nef présente une élévation à deux niveaux, avec grandes arcades sur piliers et fenêtres hautes, appartenant à la construction du 11e siècle mais très remaniée au cours du temps. Les piliers ronds et carrés ont été en majeure partie refaits : les quatre piliers ronds au nord sont de la fin du 15e siècle et les trois piliers ronds au sud sont du milieu du 17e siècle avec chapiteaux cubiques. Des piliers carrés des dernières travées, seul le quatrième pilier au sud remonte au 11e siècle, avec son pilastre du côté du bas-côté. Les demi-piles maçonnées à l’intérieur de la façade ouest sont également d’origine. Les parties hautes de la nef appartiennent à une reconstruction vers le milieu du 12e siècle : des pilastres sur consoles supportaient une voûte en berceau disparue, qui remplaçait vraisemblablement une charpente primitive. Les consoles sont sculptées de têtes humaines, animales ou grotesques assez rudimentaires. Comme à l’extérieur, des arcades en plein cintre encadrent les fenêtres hautes dans les deux dernières travées au sud. La voûte d’arêtes sur doubleaux actuelle ne date que de 1647. Les bas-côtés sont voûtés d’arêtes appareillées en moellons sans doubleaux. Le mur sud est d’origine, le mur nord a été refait comme les baies. Des dalles funéraires des 16e et 17e siècle sont à voir dans le bas-côté nord.

 

Intérieur de la nef :
Nef vers l'est
Nef vers l'ouest
Elévation nord
Elévation sud
Arcades
Fenêtres hautes
Culot sculpté
Culot sculpté
Bas-côté sud
Bas-côté sud
Bas-côté nord
Bas-côté nord

 

Le transept est remanié avec la destruction des croisillons remplacés par des collatéraux sous voûtes postérieures en berceau longitudinal prolongeant les bas-côtés de la nef. La croisée remonte au milieu du 11e siècle avec sa coupole romane remaniée aux vestiges de trompes et ogives gothiques sur culots. Les arcs en plein cintre reposent sur des piliers quadrilobes en moyen et grand appareil avec colonnes engagées du côté ouest et pilastres chanfreinés du côté est. Les arcs latéraux de la croisée ont été murés tardivement.

 

Intérieur du transept :
 
Transept
Coupole
Arc est
Bas-côté
 

 

Le chœur enfin représente peut-être la partie la plus intéressante de l’église. Bien que remanié également, il donne une bonne idée de la partie orientale de l’abbatiale du 11e siècle. Une travée voûtée en berceau communique avec les bas-côtés, au nord et au sud, par des arcades doubles sur un pilier octogonal maçonné en petit appareil avec des angles abattus en triangle. Les bas-côtés également voûtés en berceau montrent des arcades murées dans les murs latéraux de la dernière travée, qui communiquaient vraisemblablement avec les deuxièmes bas-côtés disparus. Ces parties latérales du chœur ont été remplacés à l’époque gothique par des chapelles, avec au sud les chapelles St-André (ouvrant sur l’ancienne croisillon) et du Sacré-Cœur (transformée en sacristie), conservant encore une pile ronde et les traces d’une absidiole, et au nord une chapelle remaniée du chapitre. L’abside rectangulaire de l’église a été reconstruite en style gothique primitif avec voûte d’ogive et colonnes engagées aux culots et chapiteaux. Dans le chœur on peut remarquer encore des dalles funéraires du 14e siècle, la chasse du 19e siècle du reliquaire de St-Taurin et une piscine du 19e siècle. Le Musée d’archéologie de Lons conserve des statues du 12e siècle provenant de la piscine du chœur.

 

Intérieur du chœur :
 
Chœur
Abside
Arcades
Pilier
 
 
Bas-côté
Arcade
Chapelle sud
Chapelle nord
 

 

L’emplacement du prieuré clunisien marque encore la Place du chapitre et le quartier autour de l’église. Il ne reste rien du cloître et des bâtiments claustraux qui se situaient au flanc sud de l’église. La grande maison prieurale, reconstruite en 1777 englobant quelques parties anciennes, a été conservée au sud-est. Les maisons du chapitre entourent la place devant l’église avec la maison du réfectorier percée par une porte moderne et la maison des chambriers et sa tour carrée au sud. La fontaine de la place a été transportée à la Place de la Mairie en 1791. Une enceinte triple ceinturait autrefois le cloître, l’abbaye et la ville. Au nord de l’abbatiale se trouvait enfin une église paroissiale dédiée à Notre-Dame de l'Assomption et Saint-Taurin, érigée vers la fin du 12e siècle, et démolie en 1774.

 

Bâtiments du prieuré : la maison des chambriers

 

 

Visite

L'église se visite toute l'année.

Pour en savoir plus sur Gigny, vous pouvez visiter les sites Internet suivants :

Page stucturae : https://structurae.info/ouvrages/eglise-saint-taurin.
Page wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Abbaye_Saint-Pierre_de_Gigny.
Page pormenaz : http://pormenaz.free.fr/Gigny-sur-Suran.php.
Page clochers : http://clochers.free.fr/base/gigny.html.
Article C.E.M. : https://cem.revues.org/11891.
Article Sapin : https://journals.openedition.org/archeomed/25240.
Albums de photos : https://www.flickr.com/photos/art_roman_p/sets/72157626972795961/ et http://mapio.net/o/672619/.

Vous pouvez également consulter les références suivantes :

- Braun S., Le Jura roman : architecture et sculpture, XIe-XIIe siècles, 2005.
- David S., Dans le Jura roman: Premières églises, 2021.
- Lacroix P., Eglises Jurasiennes Romanes et Gothiques, Cetre.
- Lambert M-J. et Vergnolle E., Eglises romanes du Jura, 1998.
- Oursel R., Franche-Comté, Bresse romanes, Zodiaque, La Nuit des temps, 1979.
- Sapin C., Arnaud C. et Berry W., Bourgogne Romane, Dijon, 2006.

- Sapin C., Gigny - Prieuré Saint-Taurin, Dossiers d'Archéologie, 2002.
- Vincent J-L., Eglises du Jura, 2022.
- Voros C., Sites Clunisiens en Europe, Fédération des Sites Clunisiens, 2004.


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